Covid Long : Les oubliés de la pandémie

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Une synthèse avec quelques extraits choisis :

Alors que le Covid-19 ne fait plus les gros titres, une réalité méconnue persiste : le Covid Long. À chaque infection ou réinfection, le risque de développer cette forme chronique de la maladie est bien réel. « En janvier 2023, une étude internationale estimait à 65 millions le nombre de personnes atteintes de Covid Long à travers le monde », rapporte la RTBF. Pourtant, en Belgique, aucun suivi systématique ou chiffre officiel ne vient éclairer la situation.

Une maladie invisible mais invalidante

Les témoignages des patients révèlent une souffrance profonde. Isabelle, 36 ans, malade depuis quatre ans, raconte :

« Le plus compliqué pour moi, c’est la douleur permanente. Je suis sous des médicaments lourds, sans lesquels je ne pourrais pas fonctionner. Je suis en fauteuil roulant, et je perds peu à peu la motricité fine. »

Elle décrit également l’impact sur sa vie familiale :

« Je ne pouvais pas porter ma fille. Je jouais avec elle par terre, incapable de me relever seule. »

Ces récits mettent en lumière l’invisibilité du Covid Long et les défis quotidiens auxquels ces malades doivent faire face, entre symptômes fluctuants et scepticisme médical.


Des parcours marqués par le déni médical

Valérie Delcourt, psychologue et ancienne directrice dans un centre PMS, partage son expérience. Après un Covid initial léger, elle a développé des symptômes graves. Son entourage médical, comme celui de nombreux autres patients, a minimisé son état :

« Mon médecin pensait que c’était un burn-out ou une dépression. Ce n’est que grâce à une étude coordonnée par le Dr BESSE à l’hôpital Brugmann que mon diagnostic a été confirmé. Les scintigraphies cérébrales ont montré des hypométabolismes. »

Pourtant, ce diagnostic reste hors de portée pour de nombreux patients. Valérie déplore :

« En Belgique, il y a encore beaucoup de déni. Les médecins nous parlent de burn-out alors que les preuves scientifiques existent. »


Une mobilisation pour la reconnaissance

Face à l’absence de soutien, des malades ont créé une ASBL. Isabelle explique leur motivation :

« Personne ne porte notre voix. Nous avons besoin de faire reconnaître cette maladie. »

Antonacci Tomaso, président de l’ASBL, insiste sur leurs objectifs :

« L’amélioration de la prise en charge est la première priorité. Nous voulons sensibiliser les politiques et récolter des fonds pour la recherche. Si tout le monde pouvait reprendre le travail parce que tout le monde est guéri, il n’y aurait plus besoin d’ASBL. »

Leurs actions incluent des enquêtes sur l’impact social, économique et sanitaire du Covid Long, ainsi que des efforts pour connecter chercheurs et patients.


Les infections ne renforcent pas l’immunité : une idée fausse à déconstruire

Antonacci Tomaso, président de l’ASBL Covid Long, aborde une croyance répandue qui, selon lui, aggrave la gestion de la pandémie et de ses conséquences :

« Beaucoup pensent que les infections renforcent l’immunité. Cette idée est fausse et dangereuse. Chaque infection par le Covid affaiblit davantage le corps, en particulier le système nerveux. »

Il explique que le Covid-19 ne se limite pas aux symptômes respiratoires. Le virus peut provoquer des inflammations systémiques et cibler des zones cruciales du cerveau :

« Le Covid attaque le cerveau, crée de l’inflammation et endommage les fonctions autonomes, comme respirer, digérer ou même tenir debout. Ces dommages augmentent à chaque réinfection, aggravant les symptômes chez ceux qui souffrent déjà de Covid Long. »

Tomaso souligne que cette croyance erronée a des répercussions collectives :

« On sous-estime l’impact des expositions répétées. Même si certains ne développent pas un Covid Long sévère, ils souffrent d’une fatigue chronique ou d’une baisse de leurs capacités, ce qui pourrait être lié à ces inflammations persistantes. »

Sur le plan sociétal, les conséquences sont alarmantes :

« Depuis 2020, on observe une augmentation des maladies chroniques, particulièrement chez les jeunes. Entre 2019 et 2023, le nombre de malades chroniques chez les moins de 24 ans a triplé en Espagne selon les chiffres officiels. L’idée que l’infection est bénéfique à long terme est donc non seulement fausse, mais également préjudiciable. »

Pour Tomaso, il est urgent de déconstruire cette idée reçue et de sensibiliser sur les risques réels :

« Les infections répétées n’améliorent pas l’immunité. Elles exposent les malades à des inflammations systémiques, avec des conséquences à long terme pour la santé publique et l’économie. »


Des professionnels en première ligne

Brigitte, médecin généraliste et elle-même atteinte de Covid Long, témoigne du manque de soutien pour les soignants malades :

« Des collègues m’ont dit d’arrêter d’aller sur les groupes de patients. Les médecins ne sont pas formés, et il y a encore beaucoup de déni. »

Elle souligne également la difficulté d’aider les enfants atteints, souvent sous-diagnostiqués :

« Si je n’avais pas vécu ça, je n’aurais pas su écouter ma fille. Les enfants contaminés traînent souvent des symptômes qu’on attribue à autre chose. »


Elle souligne l’incompréhension médicale et sociale :

« Beaucoup de médecins fuient ce sujet. Dire « je ne sais pas » est compliqué pour eux. Peut-être qu’eux aussi ont peur. Moi-même, parfois, je mets la tête dans le sable. Je n’ai plus envie d’entendre parler du Covid. »


Un déni collectif face à une réalité dérangeante

Le témoignage de Brigitte illustre un phénomène répandu : l’évitement collectif.

« Nous vivons dans une société qui veut tourner la page. Les médecins ne sont pas formés. Beaucoup de gens pensent que le Covid, c’est fini, qu’il ne faut plus en parler. Mais les dégâts sont là. »

Elle évoque le poids émotionnel pour les malades et les soignants :

« Lire les articles scientifiques fait peur. Découvrir les dommages persistants, les risques accrus de réinfection… c’est angoissant. Alors parfois, on préfère ne pas y penser. »


Un appel à briser le silence

Brigitte met en lumière une problématique cruciale : le poids du silence autour du Covid Long.

« On préfère dire aux malades qu’ils font un burn-out, qu’ils sont anxieux ou même hystériques, plutôt que de reconnaître la maladie. C’est plus facile que d’admettre qu’il y a encore beaucoup à apprendre. »

Elle insiste sur la nécessité de sensibilisation :

« Le Covid Long coûte cher, non seulement pour les familles, mais aussi pour l’État. Investir dans la recherche et la formation des médecins est indispensable pour prévenir d’autres drames. »


Vers un changement de paradigme

Les membres de l’ASBL Covid Long espèrent inverser la tendance en brisant le cycle de l’évitement. Tomaso conclut :

« Si on n’agit pas maintenant, le coût humain et économique sera insupportable. Nous devons sortir du déni collectif et construire un futur où cette maladie sera reconnue, traitée et mieux comprise. »

Brigitte, elle, reste lucide mais déterminée :

« Ce que je vis, ce n’est pas une vie. Mais je continue à espérer un traitement. Pour moi, pour ma fille et pour tous ceux qui souffrent. »


Ce reportage de Céline BIOURGE souligne le besoin urgent de reconnaissance, de recherche et de formation pour répondre à une crise qui, bien que silencieuse, bouleverse des milliers de vies en Belgique et au-delà.

Si vous êtes concernés ou sensibilisés n’hésitez pas à nous rejoindre pour apporter du poids à notre action.

L’asbl remercie la journaliste et la RTBF pour la qualité de l’écoute et du reportage.

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