Auteur : Alain Trautmann, Institut Cochin, Inserm U1016, CNRS UMR8104, Université Paris-Cité, Paris, France

Lorsqu’une infection aiguë survient, la réponse immunitaire s’active, combat l’agent pathogène, puis se résout progressivement. Le corps conserve alors une mémoire de l’événement, à la fois dans l’immunité adaptative (cellules T et B mémoire) et dans l’immunité innée (par le phénomène de “trained immunity”). Ce scénario de résolution est la norme.

Mais dans une minorité de cas, l’histoire ne se termine pas là. L’infection initiale laisse place à une pathologie chronique, marquée par une fatigue persistante, des troubles cognitifs, un sommeil non réparateur, des douleurs diffuses, et d’autres symptômes variables selon les individus. Ces syndromes sont regroupés sous le terme de PAIS (Post-Acute Infection Syndromes).

Dans cette revue, Alain Trautmann examine en profondeur trois PAIS emblématiques :

  • Le long COVID, consécutif à l’infection par le SARS-CoV-2 ;
  • Le syndrome post-traitement de la maladie de Lyme (PTLDS), induit par Borrelia ;
  • Le syndrome de fatigue chronique / encéphalomyélite myalgique (ME/CFS), dont l’étiologie demeure incertaine mais dont l’origine post-infectieuse semble probable.

Le ME/CFS partage les symptômes centraux des deux autres PAIS, sans qu’un agent pathogène unique n’ait été identifié. Plusieurs épisodes épidémiques inexpliqués, survenus au cours du XXe siècle (Los Angeles, Londres, Islande, etc.), laissent supposer un déclencheur infectieux, sans preuve formelle. Parmi les suspects les plus fréquents figure le virus Epstein-Barr (EBV).

Les symptômes caractéristiques des PAIS forment un noyau commun : fatigue marquée, troubles cognitifs (« brain fog »), myalgies, céphalées, troubles du sommeil. À ceux-ci s’ajoute une grande diversité de manifestations affectant les systèmes cardiovasculaire, digestif, neurologique, immunitaire, entre autres.

Cette hétérogénéité clinique constitue un défi majeur pour la recherche et la prise en charge. Les différences d’expression individuelle ne tiennent pas seulement à la nature du pathogène initial, mais aussi — et surtout — au terrain préexistant : susceptibilité génétique, épigénétique, histoire infectieuse, état du système immunitaire ou mitochondrial, etc.

L’objectif de cette revue est double :

  1. Proposer une synthèse multidisciplinaire des mécanismes immunologiques, métaboliques et neurophysiologiques impliqués dans les PAIS ;
  2. Introduire des concepts intégrateurs, tels que les boucles inflammatoires auto-entretenues et la dysrégulation de l’interoception, pour expliquer la chronicité et la diversité de ces syndromes.

Dans cette perspective, les PAIS sont envisagés non pas comme des entités homogènes, mais comme des architectures pathologiques composites, façonnées par l’interaction complexe entre infection et vulnérabilités individuelles.

🧬 Partie I. Immunité, inflammation et métabolisme dans les PAIS

La plupart des symptômes d’un PAIS sont partagés avec d’autres PAIS

Les syndromes post-infectieux partagent un noyau symptomatique commun, quelle que soit leur origine infectieuse. Fatigue intense, troubles cognitifs, douleurs musculaires ou articulaires, sommeil non réparateur, céphalées… ces manifestations sont présentes à des degrés divers dans le long COVID, le ME/CFS et le syndrome post-traitement de la maladie de Lyme (PTLDS).

Le tableau comparatif proposé par l’auteur illustre clairement cette recoupement symptomatique massif, tout en soulignant quelques spécificités liées aux tropismes des agents pathogènes :

  • Le SARS-CoV-2, avec son affinité pour les muqueuses respiratoires et les vaisseaux sanguins, induit plus souvent anosmie, dyspnée, troubles vasculaires.
  • Borrelia, en revanche, montre une prédilection pour les tissus conjonctifs, expliquant la fréquence de l’arthrite, des douleurs diffuses ou des troubles neurologiques périphériques dans le PTLDS.

Malgré ces nuances, la superposition symptomatique reste dominante, ce qui suggère l’existence de mécanismes physiopathologiques communs. Cette observation justifie une analyse transversale des PAIS, au-delà des seuls diagnostics étiologiques.

Déclenchement et perpétuation des PAIS

(PAIS triggering and perpetuation)

Le développement d’un syndrome post-infectieux ne dépend pas uniquement du pathogène responsable de l’infection aiguë, mais surtout du terrain individuel sur lequel cette infection survient. Ce terrain reflète un ensemble de facteurs : génétique, épigénétique, antécédents infectieux, état immunitaire, métabolisme, mode de vie, etc.

Certains patients présentent, parfois depuis l’enfance, une réactivité inhabituelle aux infections, se manifestant par des épisodes infectieux prolongés, intenses ou fréquents. Ces signes discrets pourraient être les prémices d’une vulnérabilité sous-jacente aux PAIS.

Après l’infection, plusieurs boucles pathologiques auto-entretenues peuvent s’installer :

  • Réponse immunitaire inadaptée ou excessive
  • Persistance du pathogène ou de ses composants
  • Dysfonction mitochondriale
  • Activation neurovégétative anormale
  • Prédisposition auto-immune

Ces mécanismes ne sont pas mutuellement exclusifs ; ils peuvent se combiner en cascades complexes, expliquant à la fois la diversité des tableaux cliniques et la chronisation des symptômes.

Les trajectoires évolutives sont également variables. Si certains patients s’améliorent avec le temps, une large proportion (notamment dans le ME/CFS) présente une maladie stable, fluctuante ou progressivement aggravée. La compréhension des facteurs de perpétuation est donc essentielle pour orienter les prises en charge.

Les Syndromes post infectieux peuvent être induits par de nombreux pathogènes

Contrairement à l’idée selon laquelle seuls certains virus seraient responsables de syndromes post-infectieux, les données actuelles montrent que les PAIS peuvent être déclenchés par une large variété de pathogènes — virus, bactéries, voire combinaisons des deux.

Les virus à ARN représentent la majorité des agents impliqués :

  • SARS-CoV-2 (long COVID)
  • Virus de la dengue, chikungunya, virus West Nile
  • Entérovirus, polio, H1N1
  • Ebola, SARS-CoV-1

Mais les virus à ADN comme l’EBV (Epstein-Barr virus), et des bactéries comme Borrelia (maladie de Lyme), sont également impliqués dans des PAIS bien documentés.

Ce qui distingue ces pathogènes n’est pas uniquement leur nature, mais surtout leur capacité à persister dans l’organisme ou à induire des altérations durables de l’immunité, du métabolisme ou du système nerveux. Certaines infections peuvent même réveiller des virus latents ou déclencher une cascade inflammatoire disproportionnée par rapport à l’infection aiguë initiale.

Ainsi, le déclenchement d’un PAIS n’est pas spécifique à un microbe donné, mais plutôt à l’interaction entre le pathogène et un hôte vulnérable. Cette constatation renforce la nécessité d’approches transversales et mécanistiques, plutôt que strictement étiologiques.

Mécanismes sous-jacents à la diversité clinique des PAIS

La grande variabilité des symptômes observés dans les PAIS, d’un patient à l’autre, s’explique en grande partie par des réponses immunitaires mal adaptées, des facteurs de susceptibilité individuelle, et la complexité des interactions entre systèmes biologiques.

1. Réponses immunitaires inappropriées

Certains patients présentent une réponse immunitaire trop faible, incapable d’éradiquer le pathogène, tandis que d’autres développent une réponse exagérément inflammatoire. Dans les deux cas, cette réponse inadéquate peut conduire à une chronicité.

Des observations issues du long COVID montrent que certains patients ont un profil sérologique déficient (absence d’anticorps ou de cellules T spécifiques), tandis que d’autres présentent des titres élevés d’anticorps mais toujours symptomatiques. Cela suggère que la qualité et la régulation de la réponse immunitaire sont plus déterminantes que son intensité seule.

2. Sexe et susceptibilité auto-immune

Le sexe joue un rôle important : les femmes, dont l’immunité antivirale est souvent plus robuste (via l’influence des œstrogènes et des gènes sur le chromosome X), semblent moins exposées aux formes sévères d’infections aiguës, mais plus vulnérables aux pathologies chroniques et auto-immunes. Cette dualité pourrait expliquer leur surreprésentation dans les PAIS.

3. Auto-immunité

Si les PAIS ne sont pas strictement auto-immuns, plusieurs études ont identifié des signes d’auto-réactivité dans le long COVID, le ME/CFS et le PTLDS : anticorps dirigés contre des neurones, récepteurs du système nerveux autonome, jonctions épithéliales, ou composants mitochondriaux.

Des résultats récents vont jusqu’à montrer que le transfert d’anticorps IgG de patients atteints de long COVID à des souris peut induire des symptômes neurologiques, suggérant un rôle pathogène direct des auto-anticorps.

4. Inflammation fluctuante et localisée

L’inflammation dans les PAIS peut être discrète, localisée (comme une neuroinflammation), ou fluctuante. Elle est parfois invisible sur les biomarqueurs systémiques classiques (CRP, cytokines circulantes), ce qui complique le diagnostic biologique. Des formes inflammatoires et non-inflammatoires de long COVID ont été décrites selon les profils de cytokines ou d’imagerie cérébrale.

Ainsi, la diversité des présentations cliniques des PAIS repose sur l’imbrication de facteurs immunitaires, hormonaux, génétiques et neurologiques, qui interagissent différemment selon les individus.

Neutrophiles et plaquettes

Les neutrophiles et les plaquettes jouent un rôle clé non seulement dans la réponse immunitaire aiguë, mais aussi dans la chronicité inflammatoire observée dans les PAIS.

Lors d’une activation excessive, les neutrophiles peuvent libérer des pièges extracellulaires (NETs) — des structures de chromatine contenant des protéines antimicrobiennes. Bien qu’utiles pour piéger les pathogènes, ces NETs peuvent également :

  • Endommager les tissus environnants,
  • Stimuler la coagulation,
  • Favoriser la formation de micro-caillots en interagissant avec les plaquettes.

Dans le long COVID, la présence de NETs a été documentée à la fois pendant la phase aiguë et à distance de l’infection. Ces NETs sont associés à une vasculite, une hypercoagulabilité, et une activation chronique des plaquettes.

Des anomalies similaires ont été observées dans le ME/CFS :

  • Microclots persistants,
  • Réponse plaquettaire anormale après un effort physique.

Ces données suggèrent que l’axe neutrophiles–plaquettes–endothélium pourrait constituer une boucle auto-entretenue de micro-inflammation vasculaire, contribuant à la fatigue, aux douleurs musculaires, et aux troubles circulatoires fréquemment rapportés par les patients.

Mastocytes, histamine et PAIS

Les mastocytes, cellules immunitaires présentes dans les tissus conjonctifs et autour des vaisseaux, jouent un rôle central dans les réponses inflammatoires rapides. Lorsqu’ils sont activés, ils libèrent de nombreux médiateurs, dont :

  • Histamine (impliquée dans l’hypersensibilité et les réactions allergiques),
  • Cytokines, leucotriènes, prostaglandines.

Dans les PAIS — en particulier dans le long COVID — des signes d’activation mastocytaire ont été fréquemment observés. Cela se manifeste par des symptômes compatibles avec une activation inappropriée des mastocytes :

  • Fatigue,
  • Troubles digestifs (nausées, douleurs abdominales),
  • Troubles neurocognitifs,
  • Intolérances multiples (alimentaires, chimiques, médicamenteuses).

Certains patients présentent des profils compatibles avec un syndrome d’activation mastocytaire (MCAS), parfois non diagnostiqué avant l’infection.

Des traitements antihistaminiques (H1 et H2) ont montré une efficacité partielle chez certains patients atteints de long COVID, soulageant fatigue, troubles digestifs ou neurologiques. Cette efficacité appuie l’hypothèse d’une contribution des mastocytes à la physiopathologie.

En revanche, peu de données sont disponibles sur l’activation mastocytaire dans le PTLDS ou le ME/CFS, ce qui souligne un besoin de recherche spécifique sur ce sous-thème.

Lymphocytes T et triangle T–B–monocytes

Dans les PAIS comme le long COVID ou le ME/CFS, des altérations des lymphocytes T ont été clairement documentées. En particulier :

  • Les lymphocytes T CD8+ présentent un phénotype épuisé, avec une capacité réduite à répondre efficacement à une stimulation antigénique.
  • Les CD4+ T cells montrent une activation excessive, avec un biais Th2 et une migration préférentielle vers les tissus inflammés.

Une étude utilisant la tomographie par émission de positons (PET) a révélé une activation accrue des lymphocytes T dans plusieurs organes (moelle épinière, paroi intestinale) chez des patients atteints de long COVID, même des mois après l’infection.

Les lymphocytes T ne fonctionnent pas en vase clos. Ils interagissent intensément avec :

  • Les lymphocytes B, producteurs d’anticorps,
  • Les monocytes/macrophages, cellules de l’immunité innée.

Ces trois types cellulaires forment un réseau d’activation réciproque :

  • Les T CD4+ activent les B via CD40L–CD40 ;
  • Les B activés produisent des anticorps capables d’activer les macrophages via les récepteurs Fc ;
  • Les monocytes stimulés libèrent des cytokines qui renforcent l’activation des T et B.

Ce cercle vicieux inflammatoire, bien connu dans les maladies auto-immunes, pourrait jouer un rôle analogue dans les PAIS, en particulier au niveau cérébral, où il contribuerait à la neuroinflammation chronique.

Imagerie cérébrale de la neuroinflammation ou de l’hypométabolisme

Des techniques d’imagerie avancée ont permis de documenter la présence de neuroinflammation et de troubles du métabolisme cérébral chez des patients atteints de PAIS, en particulier dans le long COVID, le ME/CFS et la maladie de Lyme neurologique.

Neuroinflammation

  • La TEP (tomographie par émission de positons) avec des traceurs spécifiques de la microglie activée a montré une activation gliale persistante dans plusieurs régions cérébrales.
  • Dans le ME/CFS, des signes de neuroinflammation sont présents dans le thalamus, l’amygdale, l’hippocampe et le tronc cérébral.
  • Des anomalies similaires sont décrites dans le PTLDS et la sclérose en plaques.

Hypométabolisme cérébral

  • Des patients atteints de long COVID présentent, via l’imagerie TEP au 18F-FDG, un hypométabolisme cérébral diffus, notamment dans le tronc cérébral, l’amygdale droite, et le système limbique.
  • Fait marquant : les régions cérébrales hyperactives durant la phase aiguë deviennent hypoactives dans la phase chronique, suggérant un épuisement ou une désadaptation fonctionnelle.
  • L’imagerie par IRM structurelle a également mis en évidence une perte de matière grise dans l’orbitofrontal et le gyrus parahippocampique, corrélée à des troubles cognitifs.

Ces observations renforcent l’idée que les PAIS s’accompagnent de dysfonctions cérébrales durables, potentiellement liées à des mécanismes inflammatoires, auto-immuns, vasculaires ou métaboliques. Elles confirment que la fatigue, les troubles cognitifs et émotionnels des patients sont enracinés dans des altérations objectivables du système nerveux central.

Dysfonctionnement mitochondrial dans les PAIS

Les mitochondries, centrales énergétiques des cellules, jouent un rôle clé dans la physiopathologie des PAIS. De nombreuses données suggèrent que leur fonctionnement est altéré chez les patients atteints de ME/CFS et de long COVID, en lien direct avec la fatigue chronique, l’intolérance à l’effort et les troubles cognitifs.

Anomalies observées :

  • Diminution de la production d’ATP (énergie cellulaire),
  • Accumulation de ROS (espèces réactives de l’oxygène), entraînant un stress oxydatif,
  • Hypométabolisme cellulaire : les cellules des patients ne parviennent pas à augmenter leur respiration en situation de stress (exercice, infection).

Ces anomalies ont été mesurées dans divers types cellulaires, notamment les lymphocytes, neutrophiles, et dans le liquide céphalo-rachidien (lactate élevé).

Le FGF-21, marqueur d’un stress mitochondrial, est significativement élevé chez les patients présentant une atteinte cognitive importante dans le long COVID.

Boucles pathologiques :

Un cercle vicieux peut s’installer :

  1. Les mitochondries produisent des ROS.
  2. Ces ROS endommagent davantage les mitochondries.
  3. La production d’ATP diminue, la production de ROS augmente : une boucle d’amplification auto-entretenue.

Ce mécanisme est également soutenu par la présence d’auto-anticorps dirigés contre la cardiolipine, un composant des membranes mitochondriales, dans le ME/CFS, le long COVID et la sclérose en plaques.

Enfin, l’inflammation chronique et les cytokines comme le TNF-α ou l’IL-1β peuvent altérer directement la fonction mitochondriale, en inhibant la phosphorylation oxydative et en augmentant la dépendance à la glycolyse, moins efficace.

En résumé, le dysfonctionnement mitochondrial est une hypothèse centrale pour expliquer la fatigue, les douleurs et l’intolérance à l’effort caractéristiques des PAIS. Il constitue une cible thérapeutique majeure en cours d’investigation.

Syndromes post-infectieux et altération du métabolisme de la voie tryptophane–kynurénine et impact sur la sérotonine

Le tryptophane (Trp) est un acide aminé essentiel qui constitue le précurseur de deux voies métaboliques clés :

  1. La sérotonine, neurotransmetteur impliqué dans la régulation de l’humeur, du sommeil et de la douleur ;
  2. La kynurénine, dont certains dérivés ont des effets neurotoxiques (quinolinique) ou anti-inflammatoires (kynurénique).

Chez les patients atteints de PAIS, et notamment dans le long COVID et le ME/CFS, on observe une dérégulation de cet équilibre :

  • L’inflammation chronique stimule l’enzyme IDO (indoleamine 2,3-dioxygénase), qui dégrade le tryptophane en kynurénine au détriment de la sérotonine.
  • Résultat : diminution de la sérotonine, potentiellement liée aux troubles de l’humeur, à la douleur et au sommeil non réparateur.
  • Augmentation de métabolites kynurénines pro-inflammatoires ou neuroactifs.

Ce déséquilibre est renforcé par la perméabilité intestinale (translocation bactérienne, LPS), qui peut aussi activer IDO.

Le ratio tryptophane/kynurénine (TKR) est un biomarqueur indirect de cette dérégulation et de l’activité inflammatoire. Il est abaissé :

  • Chez les patients traités par interféron-alpha, connu pour induire fatigue et dépression ;
  • Dans les syndromes post-viraux comme le long COVID.

Ce mécanisme constitue un pont entre inflammation, troubles neurologiques et déséquilibres métaboliques, soulignant une fois encore l’importance des interactions système immunitaire – système nerveux – métabolisme dans les PAIS.

Influence du système microbiote–intestin dans les PAIS

Le microbiote intestinal et l’état de la barrière intestinale jouent un rôle central dans la régulation de l’immunité et de l’inflammation systémique. Dans les PAIS, cette interface intestin–système immunitaire est souvent altérée, avec des conséquences sur l’ensemble de l’organisme.

Dysbiose et perméabilité intestinale

  • Dans le long COVID, le ME/CFS et le long Lyme, on observe une dysbiose : déséquilibre des populations bactériennes, notamment une réduction des bactéries productrices d’acides gras à chaîne courte (butyrate, propionate), essentiels à l’homéostasie immunitaire.
  • L’inflammation de la muqueuse intestinale altère les jonctions serrées, augmentant la perméabilité et favorisant la translocation microbienne (bactéries, levures, endotoxines comme le LPS) vers la circulation sanguine.

Des biomarqueurs comme la zonuline et l’occludine (protéines des jonctions serrées) sont augmentés dans le sang des patients atteints de PAIS, témoignant de cette perméabilité excessive.

Inflammation systémique d’origine intestinale

La translocation de produits microbiens dans le sang induit une réponse immunitaire systémique, pouvant :

  • Réactiver des virus latents ;
  • Stimuler la production de cytokines inflammatoires (IL-6, TNF-α, etc.) ;
  • Participer à des boucles inflammatoires auto-entretenues.

Axe microbiote–intestin–cerveau

L’influence du microbiote dépasse le système digestif :

  • Les bactéries intestinales produisent des métabolites (SCFA, sérotonine, GABA…) qui agissent sur le système nerveux central via la circulation sanguine ou le nerf vague.
  • Le stress (psychique ou inflammatoire) altère à son tour la composition du microbiote, via l’axe hypothalamo–hypophyso–surrénalien (HPA) ou le système nerveux autonome.

Cette communication bidirectionnelle entre intestin et cerveau (axe microbiote–intestin–cerveau) constitue un maillon essentiel de la physiopathologie des PAIS. Elle ouvre également des perspectives thérapeutiques via :

  • L’alimentation,
  • Les probiotiques,
  • Les modulateurs de la perméabilité intestinale (comme la larazotide, en essai clinique dans le long COVID).

🧠 Partie II. Dépendance au système nerveux dans les PAIS

L’approche des PAIS ne peut se limiter à une analyse strictement immunologique ou biologique. Ces syndromes nécessitent une vision intégrative, prenant en compte les interactions dynamiques entre le corps et le cerveau.

La partie II de la revue explore précisément ce lien fondamental : comment les signaux internes sont perçus, interprétés et régulés par le cerveau, et comment une défaillance dans ces boucles de communication peut contribuer à la chronification des symptômes.


Interoception et système neuro-immunitaire

L’interoception désigne la capacité du cerveau à percevoir les signaux physiologiques internes (rythme cardiaque, inflammation, douleur, digestion…) et à y répondre pour maintenir l’homéostasie.

Elle repose sur un dialogue bidirectionnel entre :

  • Le système nerveux autonome (sympathique, parasympathique, entérique),
  • Le système immunitaire,
  • Plusieurs régions cérébrales : tronc cérébral, système limbique (amygdale, hypothalamus), cortex insulaire et cingulaire.

Dans les PAIS, cette interoception est perturbée. Le cerveau reçoit des signaux de détresse corporelle prolongés, qu’il peine à intégrer ou à réguler efficacement. Il en résulte :

  • Une amplification de certains symptômes (douleur, fatigue, nausées, anxiété),
  • Une perte de flexibilité physiologique, c’est-à-dire une capacité réduite à adapter les réponses corporelles au stress ou à l’effort.

L’interoception ne se limite pas à une perception passive ; elle génère également des boucles de rétrocontrôle, via :

  • Le système nerveux autonome (réflexe vagal anti-inflammatoire),
  • L’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA) (libération de cortisol),
  • La mémoire neuro-immunitaire : certains circuits neuronaux, lorsqu’ils ont été modifiés par une inflammation passée, peuvent entretenir une réponse immunitaire lors d’une réactivation cérébrale (concept d’“immunengram”).

Ce concept montre comment une inflammation aiguë peut laisser une empreinte neuronale durable, et comment un simple stress psychologique peut, ensuite, réactiver une inflammation périphérique via le cerveau.

Ainsi, les PAIS ne sont pas seulement des pathologies corporelles prolongées, mais aussi des syndromes de désorganisation des communications corps–cerveau, mêlant immunité, système nerveux et perception consciente.

Dysautonomie, POTS et malaise post-effort (PEM)

De nombreux patients atteints de PAIS présentent des signes de dysfonctionnement du système nerveux autonome (SNA). Ce système, qui régule les fonctions involontaires de l’organisme (fréquence cardiaque, pression artérielle, digestion, thermorégulation…), est souvent déséquilibré dans les syndromes post-infectieux.

POTS : un marqueur fréquent de dysautonomie

Le syndrome de tachycardie orthostatique posturale (POTS) est l’une des manifestations les plus courantes de dysautonomie dans le long COVID et le ME/CFS :

  • Il se manifeste par une augmentation excessive de la fréquence cardiaque (>30 bpm) lors du passage à la position debout,
  • Accompagnée de fatigue, palpitations, étourdissements, « brouillard mental », parfois de troubles digestifs.

Des tests simples, comme le Tilt test ou le NASA Lean Test, permettent de diagnostiquer ce trouble.

Le POTS est souvent associé à une hypovolémie relative, une hypersensibilité adrénergique, ou une dysfonction des barorécepteurs. Il est fréquemment retrouvé dans d’autres pathologies à composante neurovégétative, comme le syndrome d’activation mastocytaire (MCAS) ou l’Ehlers-Danlos syndrome.

Malaise post-effort (PEM)

Le malaise post-effort (PEM) est une caractéristique centrale du ME/CFS et présente chez un sous-groupe significatif de patients atteints de long COVID. Il désigne une exacerbation retardée et prolongée des symptômes après un effort physique ou cognitif.

Contrairement à une simple fatigue, le PEM implique :

  • Une perte de capacité fonctionnelle disproportionnée,
  • Un délai d’apparition des symptômes (souvent 24 à 48 h après l’effort),
  • Une durée de récupération anormalement longue (jours ou semaines).

Le PEM résulte probablement d’un effondrement temporaire de l’homéostasie : activation immunitaire, stress oxydatif, déséquilibre neurovégétatif, altération du métabolisme énergétique.

Il peut être mis en évidence par des tests d’effort cardiopulmonaire répétés sur deux jours (CPET 2-days), qui montrent une diminution anormale de la VO₂ max et de la capacité aérobie entre les deux séances — un phénomène unique aux patients présentant un PEM.

Axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA) et inflammation

L’axe hypothalamo-hypophyso-surrénalien (HPA) est un pilier de la régulation du stress et de l’inflammation. Il fonctionne via la sécrétion séquentielle de :

  1. CRH (corticotropin-releasing hormone) par l’hypothalamus,
  2. ACTH (adrénocorticotropine) par l’hypophyse,
  3. Cortisol par les glandes surrénales.

Le cortisol exerce un effet anti-inflammatoire systémique en inhibant la production de cytokines et en modulant la réponse immunitaire.

Hypoactivité de l’axe HPA dans les PAIS

Dans les PAIS, en particulier dans le ME/CFS et certains cas de long COVID, des signes d’hypoactivation de l’axe HPA sont souvent rapportés :

  • Cortisol bas au réveil ou en situation de stress,
  • Réponse anormalement faible au test de stimulation à l’ACTH,
  • Altération des rythmes circadiens du cortisol.

Cette hypoactivité pourrait être due à :

  • Une inhibition centrale par les cytokines inflammatoires (TNF-α, IL-1β),
  • Une désensibilisation des récepteurs au cortisol (résistance aux glucocorticoïdes),
  • Un conditionnement neuro-immunitaire après un stress infectieux ou psychologique intense (cf. immunengram).

Résultat : une incapacité à contenir l’inflammation, favorisant la persistance des symptômes.

Interaction avec le système nerveux autonome

L’axe HPA est en lien étroit avec le système nerveux autonome. Ensemble, ils forment le système de réponse au stress, dont le dérèglement dans les PAIS se traduit par :

  • Une mauvaise adaptation à l’effort,
  • Une vulnérabilité accrue aux rechutes,
  • Une instabilité physiologique face aux stimuli physiques ou émotionnels.

Ainsi, la dysrégulation de l’axe HPA dans les PAIS ne relève pas d’une simple « fatigue surrénalienne », mais d’un déséquilibre complexe entre le cerveau, les glandes endocrines et le système immunitaire.

Inflammation et cerveau : circuits neuronaux à mémoire inflammatoire

Une des avancées récentes les plus marquantes en neuro-immunologie est la découverte que certains circuits neuronaux conservent une mémoire des états inflammatoires passés. Ce concept, appelé « immunengram », repose sur l’idée que le cerveau peut enregistrer une réponse immunitaire, puis la réactiver ultérieurement, même en l’absence d’un nouvel agent infectieux.

Comment cette mémoire fonctionne-t-elle ?

  • Lors d’un épisode inflammatoire aigu, certaines régions cérébrales (ex. : insula, hypothalamus, amygdale) s’activent intensément.
  • Cette activation laisse une trace durable dans les circuits neuronaux, comparable à une mémoire émotionnelle ou sensorielle.
  • Lors d’une réactivation — par exemple un stress, une infection bénigne ou un effort physique — ces circuits peuvent déclencher à distance une réponse inflammatoire périphérique, via le système nerveux autonome.

Chez l’animal, des études ont montré que la stimulation optogénétique de ces circuits spécifiques pouvait provoquer une inflammation localisée, identique à celle induite initialement. Cela démontre que l’information inflammatoire peut être encodée dans les neurones.

Application aux PAIS

Dans les PAIS, cette mémoire inflammatoire pourrait expliquer :

  • La réactivation symptomatique sans cause apparente (rechutes après effort ou stress),
  • La persistance de l’inflammation malgré l’absence de pathogène actif,
  • La difficulté de « désapprendre » les réponses physiologiques anormales.

Cela renforce l’idée que les PAIS sont des syndromes neuro-immunes, dans lesquels le cerveau n’est pas un simple récepteur passif des signaux du corps, mais un acteur dynamique de la maladie chronique, capable de contribuer activement à la perpétuation des symptômes.

Une vulnérabilité préexistante dans les PAIS : HSD, MCAS, troubles neurovégétatifs

Plusieurs patients atteints de PAIS présentent des pathologies ou traits cliniques préexistants qui pourraient constituer des facteurs de vulnérabilité. Ces conditions sont souvent sous-diagnostiquées mais semblent surreprésentées dans les populations concernées.

1. HSD – Hyperlaxité ou syndrome d’hypermobilité (Hypermobility Spectrum Disorder)

Les patients atteints de syndrome d’Ehlers-Danlos hypermobile (hEDS) ou d’HSD présentent une laxité excessive du tissu conjonctif, qui peut affecter :

  • Les vaisseaux sanguins (hypotension, instabilité posturale),
  • Le tube digestif (troubles fonctionnels),
  • Le système nerveux autonome (dysautonomie).

Ces profils sont fréquents chez les femmes jeunes, un groupe fortement représenté dans les PAIS, notamment le long COVID et le ME/CFS.

2. MCAS – Syndrome d’activation mastocytaire

Le MCAS est une pathologie caractérisée par une activation inappropriée des mastocytes, entraînant la libération chronique d’histamine et d’autres médiateurs inflammatoires. Il provoque :

  • Fatigue,
  • Intolérances multiples,
  • Troubles digestifs,
  • Troubles cardiovasculaires.

Ce syndrome peut être présent avant l’infection aiguë, et être exacerbé ou dévoilé par l’épisode infectieux, contribuant à la sévérité et à la durée des PAIS.

3. Troubles neurovégétatifs (dysautonomie)

Des anomalies de la régulation autonome (comme le POTS) peuvent préexister à l’infection ou se développer secondairement. Ces troubles interfèrent avec la capacité de l’organisme à maintenir son homéostasie face aux stress métaboliques ou environnementaux.


En résumé, une proportion importante de patients atteints de PAIS semble présenter des anomalies structurelles ou fonctionnelles préexistantes, souvent non détectées, qui pourraient expliquer pourquoi une infection banale déclenche chez eux une pathologie chronique. Ces facteurs de susceptibilité représentent une piste majeure pour la recherche, mais aussi pour l’identification de populations à risque.

Évaluation de la fatigue et de l’effort

La fatigue est le symptôme cardinal des PAIS, mais aussi l’un des plus complexes à quantifier objectivement. Il est donc essentiel de la caractériser à la fois en intensité, en qualité et en répercussion fonctionnelle.

Outils de mesure recommandés :

  • Fatigue Severity Scale (FSS) : évalue l’impact de la fatigue sur la vie quotidienne.
  • Chalder Fatigue Scale : distingue fatigue physique et mentale.
  • Multidimensional Fatigue Inventory (MFI-20) : prend en compte plusieurs dimensions (motivation, activité, etc.).

Ces questionnaires permettent de documenter la fatigue chronique et de la distinguer d’une simple asthénie passagère.

Malaise post-effort (PEM) :

Le PEM est spécifique du ME/CFS et du long COVID. Son évaluation repose sur :

  • Le questionnaire DePaul Symptom Questionnaire (DSQ),
  • Le questionnaire PEM de Cotler, qui identifie les déclencheurs, le délai d’apparition et la durée de récupération.

Pour les patients suspectés de PEM, un test d’effort cardiopulmonaire sur deux jours (CPET 2-days) est le gold standard. Il objective une diminution anormale de la VO₂ max au second jour, témoignant d’un déficit de récupération métabolique post-exercice.

Tests d’effort fonctionnels (orthostatisme, endurance)

Au-delà des questionnaires, plusieurs tests fonctionnels simples peuvent être réalisés en consultation ou en recherche pour évaluer les réponses physiologiques à l’effort ou au changement de posture, souvent altérées dans les PAIS.

1. Tests d’orthostatisme

Ils permettent de dépister les troubles neurovégétatifs, notamment le POTS et l’hypotension orthostatique :

  • Tilt Test (test d’inclinaison) : mesure la fréquence cardiaque et la pression artérielle en position allongée puis verticale (inclinaison à 60-70°).
  • NASA Lean Test : alternative simplifiée, réalisable en cabinet. Le patient reste debout contre un mur pendant 10 minutes ; une augmentation >30 bpm de la fréquence cardiaque suggère un POTS.

Ces tests sont très utiles dans le long COVID, où le POTS est fréquent, mais aussi dans le ME/CFS.

2. Tests d’endurance

  • CPET (Cardiopulmonary Exercise Testing) : test d’effort sur vélo ou tapis roulant, mesurant la VO₂ max, le seuil anaérobie, la fréquence cardiaque et d’autres paramètres métaboliques.
  • Le test CPET sur deux jours est particulièrement précieux dans le ME/CFS : il met en évidence un effondrement de la capacité aérobie au deuxième jour, ce qui est hautement spécifique du malaise post-effort (PEM).

D’autres tests plus simples comme le test de marche de 6 minutes, ou des scores d’effort perçu (Borg), peuvent être utilisés pour suivre l’évolution dans le temps, bien qu’ils soient moins spécifiques.

Attention au sur-diagnostic :

Un effort trop intense peut aggraver durablement les symptômes chez les patients atteints de PEM. Il est donc essentiel d’adapter l’intensité et d’éviter des tests épuisants chez les patients les plus fragiles.

Cognition, sommeil et qualité de vie

Les troubles cognitifs, les perturbations du sommeil et la détérioration de la qualité de vie sont au cœur de l’expérience vécue par les patients atteints de PAIS. Leur évaluation structurée est indispensable pour objectiver la sévérité de l’atteinte fonctionnelle.

1. Évaluation des fonctions cognitives

Les plaintes les plus fréquentes concernent :

  • La mémoire de travail,
  • L’attention soutenue,
  • La vitesse de traitement de l’information.

Outils recommandés :

  • MoCA (Montreal Cognitive Assessment) : test global rapide, sensible aux troubles cognitifs légers.
  • Tests numériques en ligne (ex. : Cognitron) ou applications mobiles permettant un suivi longitudinal.
  • Échelles auto-administrées comme le Cognitive Failures Questionnaire (CFQ).

Les performances cognitives peuvent varier fortement selon l’état du patient, notamment après un effort ou un mauvais sommeil.

2. Évaluation du sommeil

Bien que les troubles du sommeil soient fréquents, ils relèvent rarement d’une insomnie primaire. Il s’agit plutôt de :

  • Sommeil non réparateur,
  • Microéveils fréquents,
  • Décalage de rythme circadien.

Outils :

  • Pittsburgh Sleep Quality Index (PSQI),
  • Actimétrie (bracelets connectés pour suivre le rythme veille-sommeil),
  • Journaux de sommeil et échelles subjectives.

3. Qualité de vie et impact fonctionnel

L’impact des PAIS sur la qualité de vie est majeur et souvent sous-estimé. De nombreux patients connaissent une rupture sociale, professionnelle et familiale.

Outils d’évaluation :

  • SF-36 (Short Form Health Survey),
  • EQ-5D (EuroQol),
  • WHODAS 2.0 (Organisation mondiale de la santé – handicap fonctionnel),
  • PEM Impact Questionnaire dans le ME/CFS.

Ces questionnaires permettent de documenter les limitations dans les activités quotidiennes, les besoins en assistance, et le retentissement global sur le bien-être.

Tests neurologiques et autonomiques

Dans les PAIS, les symptômes neurologiques sont fréquents mais souvent invisibles à l’imagerie conventionnelle. Des tests ciblés permettent d’objectiver certains dysfonctionnements du système nerveux autonome, central ou périphérique, particulièrement utiles dans le long COVID et le ME/CFS.

1. Exploration du système nerveux autonome

Certains examens spécialisés permettent d’évaluer l’instabilité autonome :

  • Tilt Test et NASA Lean Test (déjà évoqués) pour le diagnostic du POTS ou de l’hypotension orthostatique.
  • Test de Valsalva, variation de la fréquence cardiaque à la respiration : reflètent la balance sympathique/parasympathique.
  • Analyse de la variabilité de la fréquence cardiaque (HRV) : indicateur de la flexibilité autonome. Une HRV basse est associée à une moins bonne régulation du stress et à une inflammation chronique.

Ces tests sont particulièrement pertinents pour évaluer la dysautonomie associée aux syndromes post-infectieux.

2. Examens neurologiques complémentaires

Chez certains patients, des examens plus poussés peuvent être envisagés :

  • IRM cérébrale avec séquences spécifiques (diffusion, perfusion, FLAIR) pour détecter d’éventuelles atteintes subtiles.
  • IRM fonctionnelle ou TEP scan en recherche, pour mettre en évidence des hypométabolismes ou de la neuroinflammation (déjà abordés en Partie I).
  • Tests neuropsychologiques approfondis, réalisés par des psychologues spécialisés, pour documenter des troubles cognitifs objectivables.
  • Électroneuromyogrammes (ENMG) ou biopsies de fibres nerveuses dans le cas de suspicion de neuropathie des petites fibres, présente dans certains cas de long COVID.

3. Examens complémentaires ciblés

Selon les symptômes, d’autres examens peuvent être utiles :

  • Transit digestif, manométrie œsophagienne, entéro-IRM : troubles digestifs d’origine neurovégétative.
  • Tests sudomoteurs pour les anomalies de sudation (dysautonomie périphérique).
  • Examens ophtalmologiques ou ORL en cas de troubles sensoriels persistants (acouphènes, vertiges, vision floue…).

🧾 Conclusion

Les syndromes post-aigus infectieux (PAIS), comme le long COVID, le ME/CFS ou le PTLDS, représentent une entité clinique cohérente, bien que déclenchée par des infections diverses. Ces syndromes partagent une physiopathologie commune, marquée par :

  • Une inflammation chronique à bas bruit,
  • Des troubles neuro-immuno-métaboliques complexes,
  • Une dérégulation de l’interoception et du système nerveux autonome,
  • Une hypoactivité de l’axe HPA,
  • Un dysfonctionnement mitochondrial et intestinal.

Ces éléments s’inscrivent dans une vision systémique du corps humain, où les organes et les systèmes (immunitaire, nerveux, endocrinien, digestif) interagissent de manière circulaire, plutôt que linéaire.

Le défi majeur posé par les PAIS est leur invisibilité biologique dans les bilans conventionnels, malgré une souffrance fonctionnelle majeure. Cela appelle à :

  • Un changement de paradigme médical, intégrant les approches systémiques, neuro-immunologiques et métaboliques ;
  • Une meilleure formation des soignants à ces syndromes encore mal compris ;
  • Une recherche interdisciplinaire, associant sciences fondamentales, cliniques et sciences humaines.

Les PAIS ne doivent plus être vus comme des anomalies psychosomatiques, mais comme des troubles multisystémiques objectivables, requérant des outils d’évaluation et des traitements adaptés.

Enfin, reconnaître ces syndromes dans leur complexité mais aussi leur cohérence physiopathologique, c’est faire un pas essentiel vers la reconnaissance des patients, et l’émergence d’une médecine plus intégrative, fondée sur les preuves et l’écoute.

Trautmann, A. (2025). Core features and inherent diversity of post‑acute infection syndromes. Frontiers in Immunology, 16, 1509131. https://doi.org/10.3389/fimmu.2025.1509131

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